PICARO
Depuis 1984, un 'Picaro' sillonne les voies navigables. En néerlandais, ce nom est un jeu de mots. Dans notre langue, ce mot espagnol se traduit par 'spitsboef', un 'spits' étant un freycinet, tandis que 'spitsboef' veut dire filou. En Espagne, près d'Algeciras, il y a une petite rivière qui s'appelle Rio Picaro.
LE PREMIER PICARO (1984-1989)
PREMIERS VOYAGES
LE DEUXIEME PICARO (1989-aujourd'hui)
PLUS DE VOYAGES
EQUIPAGE
LE PREMIER PICARO (1984-1989)
Le premier Picaro était construit en 1932 par le chantier De Wachter à Boom, en Belgique. Ses anciennes devises étaient 'Thea' et 'Sian'. En 1984, ce bateau était équipé d'un Mercedes de 240 CV, datant de 1973. Son port en lourd était de 338 tonnes. L'ancien Picaro mesurait 38,60 mètres de longueur sur 5,04 mètres de largeur et avait un enfoncement maximum de 2,37 mètres.
Son prix d'achat était de 30 000 florins (environ 100 000 francs). Il fallait investir encore une telle somme pour le rendre de nouveau prêt à naviguer et apte à transporter toutes sortes de marchandises: remplacement du treuil d'ancre, changement des écoutilles, rehaussement des hiloires... Il y avait également besoin de beaucoup de nettoyage, surtout dans la cale et dans la salle des machines, et de peinture. La nouvelle entreprise de transport fluvial n'était pas susceptible à des appuis financiers de création d'entreprise: elle était considérée comme 'non viable'!
Plus tard, on a aussi remplacé les cornières. De plus, le bateau était bientôt équipé d'un nouveau bachot, d'un indicateur de vitesse de giration (aide à la navigation dans le brouillard) et d'un sondeur.
PREMIERS VOYAGES
En novembre 1984, Thijs a réalisé son premier transport, 150 tonnes de matériel de protection de berges de Tiel à Oosterhout. Ensuite il a fait encore six voyages intérieurs aux Pays-Bas. En mars 1985, le Picaro partait pour la première fois vers la France, avec 314 tonnes de charbon de Terneuzen à Corbehem. Au mois de juillet avait lieu le premier voyage vers la Saône: 223 tonnes de terreau de Coevorden à Villefranche. En ce temps là, le prix de fret pour un tel transport était de 56,50 florins par tonne. Le voyage de retour était un Gray - Deventer, avec 239 tonnes de pellettes de luzerne, à FF 142,33 par tonne.
Suivaient un transport intérieur en Hollande, un voyage vers la Seine, un voyage intérieur, un voyage dans le Nord, un voyage dans le Sud... Somme toute, l'ancien Picaro a effectué 49 voyages, transportant au total 12 000 tonnes. Certains de ces transports semblent aujourd'hui des voyages de rêve: trois fois consécutifs du bassin Rhône-Saône à Friesland...
En ce temps là, il fallait souvent attendre longtemps pour un prochain transport. Le 'record' de l'ancien Picaro était de partir à vide après huit semaines d'attente (donc qui parle de crise économique...) de Chalon sur Saône à Les Fourchards, pour y charger 160 tonnes de graines de tournesol pour Gand. Ce qui veut dire: naviguer même à chargé sans marquise. Dans la deuxième moitié des années '80, le temps d'attente moyen entre deux voyages était de 25 jours et le chiffre d'affaires moyen de 72 000 florins (environ 32 000 euros).
En 1989 le premier Picaro a été vendu, pour 47 000 florins. Sa nouvelle devise deviendrait 'Papillon'. Quelques années plus tard, le Papillon a été déchiré.
LE DEUXIEME PICARO (1989-AUJOURD'HUI)
Ce Picaro a également été construit à Boom, mais en 1964, par NV Scheepstimmerwerven Claessens. Sa devise (d'origine) était 'Credo'. Des autres 38-mètres construits par ce chantier sont le Chasseur, Hensie, Martinique, Phil-Ange, Quo Vadis et Shelendo. Le deuxième Picaro a 38,75 mètres de longueur sur 5,04 mètres de largeur avec un enfoncement maximal de 2,52 mètres. Au début, son grand tonnage était de 372 tonnes, maintenant il est de 368 tonnes. Le prix d'achat du nouveau Picaro était 102 000 florins.
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Les anciens propriétaires y ont beaucoup investi. Il fallait, parce qu'avant qu'ils l'ont acheté de son premier propriétaire, le Credo avait été longtemps délaissé. En 1982 ils l'ont doté d'un nouveau moteur, un Cummins de 325 CV, en remplacement des deux moteurs GM d'origine. Ils ont également renouvelé le keelcooling, l'arbre d'hélice et les mèches des gouvernails, le chauffage central et le groupe hydrophore. Dans la cale a été posé une cloison de ballast avec un plancher de fer dans la partie arrière. Ils ont aussi mis des nouvelles écoutilles en alu, en remplaçant l'ancien 'Friese kap' en bois. La timonerie en teck était également tout neuf.
Même que le Picaro a retenu son apparence 'original', il y a eu beaucoup de changements depuis 1989. Par exemple, le moteur auxiliaire Lister a dû être remplacé tout de suite. La première année on a également installé un groupe électrogène 220/380 V.
Les couleurs ont changé de bleu gris et blanc bleuté, en bleu cobalt (avant, arrière) et blanc cassé (fargues, logements et hiloires). Les toits sont en bleu ciel, les plat-bords et les veules avant et arrière, qui étaient goudronnés, sont maintenant peints en gris foncé.
En 1990 on a remplacé le plancher en sapin dans la partie avant de la cale, qui était difficile à nettoyer, par un tillac en fer avec des 'boîtes aux lettres'. Dans le logement avant, on a mis des fenêtres en alu. Comme le bateau était 'lourd' à manoeuvrer et à conduire, nous avons installé en 1991 un système de gouverne électrique avec pilote automatique.
En 1992 l'ancienne cuve d'eau d'environ 900 litres, qui se trouvait dans le pic arrière, a été remplacée par deux cuves de 1200 litres, suspendues dans la partie arrière de la cale. Les deux bollards à l'avant, qui étaient placés trop proche des bords du bateau, ont également été remplacés, par trois nouveaux bollards (à chaque côté). On a également mis des nouvelles défenses sur les épaulures avant et arrière. En 1993 nous avons enlevé le sol du séjour, qui était en aggloméré, et posé un plancher plus résistant à l'eau. Ensuite notre 'menuisier de bord' a remplacé les lits superposés et les casiers dans la deuxième chambre à coucher par un grand placard.
Comme le groupe électrogène installé en 1989 continuait de donner des soucis, nous avons mis un nouveau groupe Lister en 1995. Cette année on a aussi fait raccourcir les safrans (qui touchaient souvent aux portes des écluses automatisées), poser des arrivotes, créer des nouveaux dalots et enlever l'ancien bouteur, qui était déjà hors service en 1989. En 1996 on a démoli et renouvelé toute la cuisine, dont le sol, parois et placards étaient étaient en mauvais était. Pendant cette rénovation on a également installé un chauffe-eau électrique et une hotte aspirante.
En 1997, c'était le tour à la salle de bains d'être rénovée jusqu'au 'fer nu'. Tout comme dans la cuisine, on a protégé l'acier, posé de l'isolation et remplacé tous les tuyaux et câbles. Cette année on a aussi doté le Picaro d'un radar Swiss (après deux voyages 'problématiques' sur le Rhin ;-) En 1998 on a fait réviser le moteur Cummins et enlevé l'ancre arrière et son treuil, parce que les vantaux d'écluses (automatiques) y touchaient souvent.
En 2001 on a fait repeindre la cale par une entreprise spécialisée. Nous avons également remplacé toute la menuiserie dans le logement avant. De plus, on a remplacé les rebords des fenêtres du logement arrière par de l'inox. Après l'avoir longtemps douté (à cause du poids, de la perte de cubage et du prix) on a installé en 2002 un propulseur d'étrave, avec un moteur DAF de 130 CV et une grande cuve de gasoil (de réserve). A cette fin, on a créé une deuxième salle de machines à l'avant du bateau, où l'on a également posé le groupe électrogène.
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En 2004 on a doté l'arbre d'hélice d'un 'seal' spécial qui prévient l'eau d'entrer et permet de récupérer la graisse. On a également remplacé les chaînes du treuil d'ancre par des câbles en acier (plus légers), y adapté le guindeau et remplacé son moteur à essence par un moteur électrique. En 2005 on a entièrement renouvelé le tableau de bord, et ensuite aussi rénové la partie arrière de la timonerie (lambris, radiateurs, câbles,...). En 2006 le macaron (et donc tout le système de gouverne manuel) a été remplacé par un deuxième joystick (système de commande électrique de secours).
En 2007 l'ancien Swiss a été remplacé par un radar 'rasterscan' de JRC. En 2008 le Picaro s'est doté d'un nouveau moteur principal, un Doosan de 360 CV. On a également révisé l'embrayage Twin-Disk, rénové toute la salle des machines et y installé un deuxième groupe électrogène, comme vous pouvez lire et voir en détail sur la page moteur.
L'année après, nous n'avons pas dépensé beaucoup, suite aux grand investissements dans la salle des machines et la crise économique. Mais on a renové un peu la deuxième chambre à coucher pour accueillir un stagiaire. En 2010 le Picaro s'est doté d'un transpondeur AIS et tout qui va avec, comme un branchement à la carte électronique et au radar. En 2011 nous avons remis notre petit couloir. Enfin, le nez du Picaro a eu un 'facelift'.
Pour faciliter l'entretien annuel, on a aussi remplacé peu à peu toutes les 'pièces détachées' (comme garde-corps, treuils, mâtereaux, portes-feux et boîtes à feux, jumelles du mât, panneau bleu, grue de bachot, trappes et charnières, entrées et échappements,..) par l'inox ou l'alu et enlevé tout ce qui était hors d'usage.
La menuiserie de la chambre principale n'a jamais été changée, étant la seule pièce ou l'acajou d'origine était encore en relativement bon état. Le séjour n'a pas été rénové non plus, mais il a bien changé d'apparence au cours des années...
Tous nos meubles ont leur histoire, souvent liée à notre mode de vie vagabonde ou à nos familles. Par exemple, la petite table de l'ancien propriétaire a été incrustée avec des morceaux de carreaux trouvés dans un champ près de Nevers. Les portes de la bibliothèque ont été sauvées d'une poubelle à Gennevilliers, et sciées sur mesure par notre menuisier de bord, qui a également construit le canapé convertible. Du même verre ancien (venant de la maison des parents) il a fait une lampe. Deux de nos chaises sont des pièces venant de la famille, deux ont été achetées chez un antiquaire à Amsterdam (et transportées en vélo vers le Picaro...) et deux viennent du marché aux puces de Rotterdam. La table a été acheté dans une brocante à Conflans Sainte-Honorine (et pendant le décapage l'un de ses pieds est tombé dans le canal du Nord, mais fut heureusement sauvé par un autre bateau...) Le petit fauteuil est trouvé dans un dépôt-vente à Helmond, et revêtu par un oncle...
PLUS DE VOYAGES
Son premier voyage conduisait le deuxième Picaro d'Amsterdam à Chalon sur Saône avec 250 tonnes d'engrais, suivi par un Gray-Woerden avec 230 tonnes d'avoine. Tout comme le premier Picaro, il a fait ensuite un peu de tout: le Nord, le Sud, la Seine, la Champagne, la Belgique et, devenu très rare, des voyages intérieurs en Hollande.
En mai 1994 nous avons fait notre premier voyage intérieur en France, de Villefranche à Sète, avec du maïs. Un voyage exceptionnel, en deux points: jusqu'à ce moment là le cabotage était réservé aux mariniers français, et c'était notre première fois en Méditerranée! En ce temps là, on passait encore vraiment par la mer, ce qui nécessitait toutes sortes de précautions. Maintenant il y a une digue maritime. En décembre 1996 nous avons réalisé notre premier transport des Pays-Bas à Sète. Maintenant rien d'exceptionnel, mais dans ce temps là considéré comme une vraie aventure: chaque semaine, il nous fallait envoyer une carte postale avec notre position à l'affréteur! Nous y avons vécu aussi l'un des moments les plus périlleux de notre vie: en plein nuit avec beaucoup de vent et du gel (et sans radar, GPS et propulseur d'étrave) sur l'étang de Thau, en cherchant l'entrée du canal, parce que la place de stationnement pour les bateaux de commerce était occupée par des bateaux de plaisance...
Mais le Picaro avait été déclaré 'péniche de mer' déjà plus tôt: en 1991 on a transporté 300 tonnes d'engrais de Gand à Honfleur. Comme Honfleur se trouve officiellement après la limite maritime, on avait besoin de beaucoup d'équipement et de deux pilotes consécutifs. Aujourd'hui on ne décharge plus d'engrais dans les bassins de Honfleur, seulement des passagers...
Au cours des années, on a 'perdu' beaucoup de nos lieux de chargement et de déchargement traditionnels, comme Saint-Florentin dans le canal de Bourgogne, Auxerre sur l'Yonne, Amiens sur la Somme, Etreux dans le canal de la Sambre à l'Oise,...
Un autre voyage 'spécial' était Gand - Montceau les Mines avec des cokes de pétrole. Un parcours très beau, et très terrible. Etant le premier bateau chargé à emprunter le canal du Centre depuis longtemps on a eu, avec seulement 236 tonnes, tellement de branches et autres objets dans l'hélice, et on s'est échoué tellement souvent sur des hauts fonds, qu'on a craint de n'y jamais arriver. On a même vidé la cuve d'eau potable pour alléger le bateau!
Aussi 'remarquable' était un voyage à vide de Reims, où il n'y avait pas aucun transport disponible, vers la Saône, où il y avait exceptionnellement beaucoup de transports, en ce moment là. Cinq jours sans marquise dans des grosses pluies. Avec comme suite des mains 'écorchées', une timonerie gonflée et un voyage Gray-Boortmeerbeek. Dans l deuxième moitié des années '90, il y avait en général presque plus de transports du bassin Rhône-Saône vers les Pays-Bas ou la Belgique. Ce qui impliquait beaucoup de retours à vide vers Vitry-le-François ou Marseilles-les-Aubigny, ou si on avait de la chance, un voyage intérieur vers le Haut-Rhin.
Mais autre part en France il fallait également attendre souvent longtemps pour un prochain transport, de sorte qu'on partait parfois à vide de Paris jusqu'en Hollande. Vers la fin des années '90, le trafic fluvial commençait à reprendre en France. (Et, bien sûr, déjà beaucoup de 38-mètres étaient déchirés.) Dans la première moitié des années '90 notre temps d'attente moyen entre deux voyages était encore de 23 jours, dans la deuxième moitié 15,5 jours et dans les premières années de ce siècle 9,5 jours. Pendant l'été de 1993 on était même vide 62 jours consécutifs, à cause de la grève pour le maintien du tour de rôle.
Equipage
Thijs est né sur l'eau et a grandi sur le chantier naval de ses parents. Avant d'acheter son premier bateau propre, il a fait l'école d'enseignement technique et travaillé comme matelot sur un bateau citerne et un 38-mètres. Sur l'ancien Picaro il a navigué avec des différents matelots, souvent des amis ou des anciens bateliers. En 1988 il a fait (plus ample...) connaissance d'Annemarie, pendant un voyage sur le canal des Deux Mers avec le voilier de ses parents. A partir de 1989 Annemarie, en ce temps là encore étudiante en histoire d'art (n'aimant pas du tout l'eau et la navigation, mais bien la France!) devenait une passagère régulière; depuis 1992 elle est une membre fixe de l'équipage.
Ferry était le premier chien de bord du Picaro, Roy le deuxième, et Kia la troisième.
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