KIA

19/2/2000 - 31/10/2014

Me voilà, Kia, la chienne à bord du Picaro. Je suis un Epagneul de Münster. Donc pas un terrier, mais j'étais vraiment une terrienne quand j'ai embarqué, un chiot de sept semaines. Pour devenir une vraie chienne d'à bord, il me fallait apprendre beaucoup d'abord.

MENEE EN BATEAU
SESAME, OUVRE-TOI
MER... !
TERRE
ON COULE
SABOT(AGE)...
DU SPORT
AU TRAVAIL

MENEE EN BATEAU

Aussitôt arrivée, j'ai compris que je me retrouvais dans une maison pas comme les autres. Du sous-sol, un grondement remontait et tout a commencé à trembler. et moi aussi  ! Mon maître m'a rassurée, c'était seulement le moteur. Ensuite, il est sorti pour larguer les amarres (mes maîtres disent 'cordes') et ma maîtresse a dirigé le bateau vers le milieu du canal.

D'ailleurs, les mariniers (ou bateliers) parlent toujours de leur 'bateau', jamais de navire ni de péniche.

SESAME OUVRE-TOI

Après quelque temps, mon maître a ralenti, car un mur avec deux portes surgissait devant nous. Ma maîtresse a appuyé sur une télécommande et les portes se sont ouvertes  ! Je me suis dit: ah, un garage à bateaux, c'est fini pour aujourd'hui.

Mais, à mon étonnement, ce garage n'avait pas de toit. Heureusement, car quand les portes se sont fermées derrière nous, l'eau a commencé à monter, ainsi que notre bateau ! Mon maître m'a expliqué que nous étions dans une écluse. Le bateau amarré, il m'a mise à terre.

Là, j'étais tellement occupée à flairer parmi les fleurs, que je n'ai pas du tout entendu que mon maître m'appelait. Le Picaro était déjà en train de sortir de l'écluse, par les portes de l'autre côté. Ouille, presque raté le coche !

MER... !

Ensuite tout est allé bien, enfin je veux dire, au départ. Sur les écoutilles, je m'amusais à regarder les plaisanciers, piétons et pêcheurs et à aboyer après mes congénères.

Mais après un certain temps, j'ai commencé à avoir un peu mal au ventre. Le mal de mer... ? Soudainement, je n'ai pu me retenir: j'avais trop besoin. Mer.. ! J'aurai mieux fait de faire ça à l'écluse. Sur un bateau, il faut toujours battre le fer pendant qu'il est chaud.

TERRE

Vers le soir, mon maître a dirigé le bateau vers un quai, et l'a amarré à des champignons en acier. On les appelle bollards, boulards ou bittes.

Sur un bateau il y a aussi des bollards, pas à tête renflée, mais à deux chevilles, qui permettent de nouer l'amarre. Combien crois-tu qu'il y a de ces boulards, sur notre bateau 

ON COULE

Le lendemain matin, mes maîtres 'ont ouvert'. Cela veut dire qu'ils ont entassé les écoutilles, afin qu'on puisse regarder dans la cale. Au risque d'y tomber, donc attention ! Un camion est arrivé et a commencé à déverser sa cargaison de céréales dans notre cale. 'Espérons que tout va dedans et qu'on ne va pas couler', je pensais. Mais quand j'ai regardé dans la cale, le contenu du camion était seulement un petit tas.

Combien penses-tu qu'on a pu charger de camions de céréales dans notre bateau, en fin de compte 

Même si on n'a pas coulé, le bateau s'est enfoncé de plus en plus pendant le chargement. Au début, les 'plat-bords' étaient à deux mètres au dessus du niveau de l'eau, mais après le chargement seulement à un demi-mètre. Malin : comme ça, tu peux voir qu'un bateau est chargé sans regarder dans la cale !

Le plat-bord se trouvant maintenant au même niveau que l'herbe, j'ai décidé d'aller à terre pour faire pipi : faut battre le fer... Bêtement, je n'ai pas vu que le bateau s'était un peu éloigné du quai et plouf ! me voilà sous l'eau. Coulée quand-même. Heureusement, mon maître m'a attrapée tout de suite par la peau de cou. Voilà mon baptême comme chien d'à bord.

SABOT(AGE)...

Comme le plat-bord d'un bateau peut être glissant quand il est humide, la plupart des mariniers portent des sabots en caoutchouc. C'est bien, pour planter ses dents dedans de temps en temps... Les sabots sont aussi faciles à mettre et enlever souvent. Car sur les bateaux, on enlève d'habitude ses chaussures avant d'entrer. Les visiteurs laissent leurs chaussures devant la porte ou dans 'la marquise' - miam ! Sur les 'Freycinet', on passe toujours par la marquise pour entrer dans le logement. En général, une marquise a une porte de chaque côté.

Moi, je pense qu'on a fait ça spécialement pour les chiens, car nous aimons sortir par l'une... pour rentrer par l'autre ;-)

SPORT

Beaucoup de gens d'à terre pensent que les chiens de bord manquent d'exercice, comme l'espace est limité. Mais chaque jour, je fais beaucoup de tours de 87 mètres. D'où vient ce nombre, à ton avis  

Quand la cale est vide, je peux y parfois jouer avec un ballon. De plus, nous faisons très souvent un tour sur le chemin du halage, à pied ou à vélo.

Je fais aussi de la natation, quand les berges ne sont pas trop en pente forte pour sortir. Heureusement, les berges des canaux français sont souvent effondrées. J'aime vraiment repêcher des bâtons, mais aussi des bouteilles en plastique. Il y a des gens qui pensent que les canaux sont des poubelles !

Bien sûr, je regrette de ne pas pouvoir joindre un club, pour jouer avec d'autres chiens. Car chaque jour j'habite une autre ville. Mais je bavarde souvent un peu avec mes collègues ou avec des chiens d'éclusiers, pendant que mon maître parle avec leur maître.

D'ailleurs, tous les bateliers appellent leurs collègues 'voisin' et 'voisine'. Et quand il faut passer par le bateau des voisins, on passe toujours par le pont avant. Cela s'applique également aux chiens !

AU TRAVAIL

Tu finirais par croire que la vie d'un chien de bord consiste à flâner et flairer. Pas du tout ! J'ai des tâches assez importantes : je m'occupe de tous types de transports internes. Quand mon maître a oublié ses gants dans la marquise, je les apporte au pont avant. Je tire le linge de son panier - vers mon panier. Et j'aide ma maîtresse à ranger les provisions.

Mais ce que j'aime vraiment c'est d'apporter des documents aux éclusiers. De plus, j'assiste à l'entretien du bateau. Par exemple, j'utilise mes oreilles pour essayer si la peinture est encore fraîche...

Enfin, je monte la garde. Oui, c'est ne pas rien d'être chien de bord !