MARCHANDISES

En route, on nous demande souvent quelle est notre cargaison. Nous transportons dans la plupart des cas des engrais ou des céréales, mais bien sûr les Freycinet et les autres bateaux de navigation intérieure sont aptes à transporter tous types de marchandises. Un transport ou 'voyage' se commence par l'affrètement. Quand un marinier s'enquiert du 'fret', il ne veut pas savoir la marchandise, mais le prix du transport par tonne.

 

un bateau peut être chargé partout, même dans une écluse! TYPES DE MARCHANDISES
CUBAGE ET TONNAGE
CHARGER
DECHARGER
'QUALITE'
QUANTITE
AFFRETEMENT
FRET


 

TYPES DE MARCHANDISES

A la différence des bateaux spécialisés, nous transportons chaque voyage des autres marchandises. Dans les ports de mer néerlandais et belges les 38 mètres chargent en général des matières premières, comme du minerai de fer, du ferrochrome, de la bauxite, du zinc, du cuivre, de l'aluminium, de la cellulose, du kaolin, des sables et sels spéciaux, mais aussi du charbon pour la France. Le plus souvent les marchandises sont transbordés directement depuis le navire. Mais il se passe aussi que les marchandises viennent d'un stockage intermédiaire à quai.

chargement de sable de zirkon à partir d'un navire chargement de minerai de fer stocké à quai

Des autres marchandises usuelles sont des demi-produits comme des engrais ou de l'acier, qu'on charge et décharge souvent directement chez les entreprises productrices et traitantes.

engrais grands coils

La plupart des marchandises mentionnées ci-dessus sont transportées en vrac : on les déverse directement dans la cale. Certains produits sont emballés en paquets, en sacs ou en 'big bags'. Le cuivre est transporté sous forme de paquet de tôles, l'acier en rouleaux (de 5 à 22 tonnes), le zinc et l'aluminium en blocs. Des colis lourds (éléments de construction comme des parties des ponts, silos, transformateurs) sont également transportés en bateau… rien d'exceptionnel par voie d'eau ! On peut aussi transporter des grumes. Un 38 mètres traditionnel n'est pas trop approprié au transport de conteneurs, mais on pourrait bien transporter des pallettes.

cuivre grumes petit coils

En France, nous chargeons surtout des produits agricoles, pour la consommation humaine ou animale ou pour la production des biocarburants, à destination des Pays-Bas, de la Belgique ou de l'Allemagne. C'est le plus souvent du blé, de l'orge, du colza, du maïs, du malt ou des petits pois. Sur le Rhône on charge parfois du riz de Camargue.

colza riz

Les transports intérieurs en France concernent en général également des céréales, vers les ports maritimes, ou des matériaux de construction. Dans le Sud de la France nous chargeons de temps en temps du bauxite, du clinker ou du sel de déneigement, mais malheurement il est souvent difficile d'y trouver un transport de retour.

bauxite clinker

CUBAGE ET TONNAGE

Les 38 mètres ont en général un 'grand tonnage' ou 'port en lourd' de 350 à 380 tonnes. Combien de tonnes on peut charger dépend tant de la marchandise que de la destination.

'bateau complet'Pour la marchandise, ce qui compte est le cubage : 150 tonnes de graines de tournesol prennent plus de volume en cale que 300 tonnes de minerai de fer… Avant de charger, il est alors important de savoir le poids spécifique de la marchandise. Sur le marché céréalier, cela est d'habitude indiqué par le poids d'un hectolitre. On peut dire que le malt, l'orge fourragère et le colza sont relativement légers, tandis que le blé et l'orge de brasserie sont plus lourds.

chargement en combleBeaucoup des bateliers de Freycinet ont adapté leur bateau à des marchandises légères, en rehaussant les hiloires. Ceux qui ne disposent pas de beaucoup de cubage, doivent parfois 'bourrer', avec une pelle. Autrefois, on chargeait souvent des marchandises légères (par exemple des pellets) 'en comble', ce qui veut dire que la cargaison dépasse le haut des hiloires, et est couverte par des bâches imperméables, au lieu des écoutilles. Aujourd'hui, on charge en comble surtout des produits qui ne craignent pas la pluie, comme le charbon.

Comme beaucoup de lieux de chargement et de déchargement français se trouvent le long ou au-delà des canaux dont le tirant d'eau autorisé est limité à 1.80 m, l'enfoncement du bateau est souvent déterminant. Pour la plupart des Freycinet ce tirant d'eau correspond(ait…) à une cargaison de 240 à 250 tonnes. Ce tonnage est alors devenu usuel. Sur les voies à grand gabarit on peut naviguer avec un tirant d'eau de 2.40 m : pour un 38 mètres, cela correspond à environ 350 tonnes.

CHARGER

Dans les grands ports on charge généralement à l'aide d'une grue. Tout dépendant de la marchandise, on met parfois dans le godet 25 tonnes dans un seul coup. Les céréales sont chargées presque toujours à un silo, au moyen d'un tuyau. Pendant le chargement, le travail du marinier consiste à donner des indications, à surveiller les opérations et parfois à déplacer le bateau sur quelques mètres. Dans la pratique, c'est souvent le marinier lui même qui commande le tuyau de chargement aux silos. Aux quais où l'on ne dispose pas d'une installation de chargement fixe, on peut charger, directement ou à l'aide d'un tapis roulant, depuis des camions. Parfois il faut ensuite égaliser la marchandise à l'aide d'une pelle.

chargement de bauxite chargement de mais au tuyau chargement de colza avec deux camions au même temps

Charger un bateau c'est une opération précise: il faut non seulement bien distribuer la marchandise (lourde) afin que la construction du bateau ne soit pas surchargée, mais il faut aussi que le bateau soit chargé bien droit.

DECHARGER

Le déchargement se fait, bien sûr selon le type de la marchandise, soit par une grue (mobile), soit par aspiration. Souvent on met en plus un 'bobcat', un petit bulldozer, dans la cale. Finalement la cale est nettoyée avec un balai. Très peu de bateaux de navigation intérieure sont équipés de moyens de manutention propres, la hauteur des quais de (dé)chargement variant partout. D'habitude, le marinier n'entre pas dans la cale pendant le déchargement, en vue des risques.

déchargement d'orge par aspiration bobcat

Après le déchargement le connaissement est accompli. En général le destinataire de la cargaison y mentionne 'conforme' ou le poids déchargé, ainsi que le date l'heure de déchargement. Sur le réseau rhénan, le réceptionnaire de la marchandise doit aussi donner une attestation de propreté, selon la convention internationale des déchets des bateaux.

'QUALITE'

contrôleurPour le transport de produits alimentaires (pour animaux), ainsi que pour le transport de déchets, le marinier doit être enregistré chez des divers organismes et autorités concernants. Le chargement de céréales est presque toujours surveillé par un contrôleur, qui inspecte la propreté de la cale, établit un 'load compartment inspection' et vérifie la qualité de la marchandise. De plus, le marinier doit tenir lui-même aussi un journal des produits transportés et de la façon de nettoyage de la cale.

QUANTITE

prise des échelles Pour constater le poids chargé sur un camion, on pèse le camion, dont on connaît la tare à vide, sur une bascule. Pour un bateau, la chose serait un peu difficile ! Alors, soit on pèse la marchandise avec une bascule avant chargement, soit on calcule le poids après chargement. Pour ce calcul la bordaille de chaque bateau est équipée d'échelles de jauge. L'enfoncement (ou déplacement) du bateau correspond à une certaine masse de marchandise (principe d'Archimède). Chaque bateau a son certificat de jaugeage officiel, qui mentionne le tonnage correspondant à chaque centimètre d'enfoncement. Un 38 mètres s'enfonce en moyenne 10 centimètres pour 18 tonnes de marchandise.

certificat de jaugeage ou 'verbal'

AFFRETEMENT

séance au bureau d'affrètement de Reims Jusqu'à l'an 2000, les transports fluviaux intérieurs et 'nord-sud' étaient conclus sur un bureau d'affrètement par 'tour de rôle'. Le marinier qui avait déchargé il y a le plus longtemps, avait le droit au premier choix des transports offerts. En plus, les prix (plancher) du fret étaient fixés. En Hollande et en Belgique la 'bourse' était ouverte chaque jour ouvrable, les affrètements se faisant à des heures fixes. En France, il y avait en général trois 'séances' par semaine, tout dépendant du bureau dans le matin ou l'après-midi.

Depuis l'abolition du tour de rôle, le marinier doit téléphoner à un affréteur pour savoir les transports disponibles.

cooperative Ensuite il lui faut négocier le prix du fret et les conditions préalables du voyage qui l'intéresse. On peut aussi conclure un contrat à temps. Beaucoup de bateliers se sont réunis en associations ou en groupements qui négocient collectivement avec les courtiers de fret ou directement avec les chargeurs (donneurs d'ordre). La plupart de ces coopératives ont un tour de rôle interne.

Quand un bateau est affrété, on établit une convention d'affrètement (ou 'lettre de voiture'): un contrat unique entre marinier et affréteur, où sont marqués notamment les dates et lieux de chargement et de déchargement, la marchandise et tonnage à charger, le prix de fret et le taux de commission. Quand le chargement est terminé et le bateau jaugé, un connaissement où est noté le tonnage chargé exact est établi. Ce connaissement est, pour ainsi dire, un accusé de réception de la cargaison. Après le déchargement, le marinier envoie ce connaissement, signé et estampillé par le récepteur de la marchandise, joint à sa facture à l'affréteur. Celui-ci établit ensuite souvent encore son propre décompte de fret.

convention connaissement décompte de fret

FRET

Le mot fret peut dire cargaison, mais aussi la rémunération du batelier, exprimée en euros par tonnes. Le revenu du batelier se compose donc du prix de fret multiplié par le tonnage chargé, par exemple 10 Euro x 251,5 tonnes = 2515 Euros. Parfois s'y ajoutent des indemnités convenues comme des surestaries, ou du supplément pour carburant, crue, glace… D'ailleurs, on peut aussi convenir un montant total pour un voyage ('fret en bloc'), ou un montant par jour, au lieu d'un prix par tonne. Le fret n'a rien à faire avec la valeur de la cargaison, mais se base sur la durée ou la distance du voyage, et les frais variables et fixes y liés.

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